Un rapport américain sur le travail des enfants dans la production du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana devra être publié vers fin juin 2020. Ce rapport doit évaluer la lutte contre le travail des enfants dans la production du cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana, par le croisement des données des enquêtes 2008/2009 et 2013/2014, menées par l’Université de Tulane (États-Unis), celles de la campagne 2018/2019 pilotées par l’Institut Norc de l’Université de Chicago. C’est le Département américain du travail qui finance encore cette enquête, comme les deux autres, dans le cadre de la mise en œuvre du protocole Harkin-Engel. L’institut Norc de l’Université de Chicago, mandaté par le Département américain du travail pour mener l’enquête sur la campagne 2018/2019, a partagé avec les pays concernés son projet de rapport. Malgré les observations de ces pays sur la méthodologie utilisée et l’échantillonnage, l’Institut Norc n’entend pas modifier son rapport. La réaction du Ghana a été communiquée début avril par le porte-parole du Cocoboard, Fifi Boafo, qui a relevé la mauvaise formulation de certaines questions.
En Côte d’Ivoire, c’est le Comité national de surveillance des actions de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants (Cns), qui a réagi le 25 mai 2020 par un communiqué. Le pays a indiqué qu’elle ne saurait approuver ce rapport, tant que ses observations ne sont pas prises en compte. Les préoccupations de la Côte d’Ivoire concernent notamment l’échantillonnage, la généralisation des résultats et les problèmes liés à la période de référence pour la collecte de données. Elles rendent impossibles les comparaisons précises, selon le Cns, entre certaines données essentielles du travail de Norc et celui de l’Université Tulane. De là, la probabilité de se tromper dans les conclusions de l’étude menée par Norc est considérablement élevée. En dépit des différents ateliers techniques avec les équipes de Norc et du Département américain du travail que la délégation ivoirienne a eus à Abibjan et à Washington D.C, les préoccupations demeurent. Pour sa part, la Fondation mondiale du cacao reconnait que le rapport n’est pas complet. Ce qui l’empêche de se prononcer pour l’heure. Toutefois, elle reconnait que les multinationales du cacao seraient en retard sur leurs calendriers d’éradication du travail des enfants. Le mandant et le mandataire, qui n’ont jusque-là pas encore réagi, évoqueraient plutôt des contraintes de comparaison de données, selon commodafrica.com du 26 mai 2020.
Selon l’agence de presse Reuters qui a pu prendre connaissance du projet de rapport, les chercheurs ont plutôt reconnu des erreurs dans les statistiques de 2013/14. Ils ont donc pris les dispositions nécessaires pour éviter que ces erreurs entament la crédibilité des nouvelles données, lesquelles reconnaissent des progrès énormes dans la lutte, notamment la forte baisse du nombre moyen d’heures de travail réalisées par les enfants dans la production de cacao et la forte augmentation de la fréquentation scolaire des enfants des ménages agricoles ; peut-on lire dans le communiqué du Cns. Mais le hic, c’est le nombre d’enfants dans la production du cacao qui est 10% supérieur à celui de l’enquête menée en 2008/2009.
Franck Tagouya